Éducation : seuls 6% des personnels soutiennent les orientations actuelles (UNSA)

Entre 45 et 50 % des personnels de direction et d’inspection veulent changer de métier. L’UNSA Éducation a présenté les résultats de son Baromètre annuel des métiers, une enquête de référence réalisée depuis plus de dix ans. Cette édition 2025, marquée par une participation record de plus de 53 000 personnels, dresse un tableau inquiétant de la situation dans l’Éducation nationale. Crise de sens, surcharges, pouvoir d’achat en berne, et perte de confiance massive dans les choix politiques.

« Ce n’est pas une question de casting, mais de cap et de vision » 

Le chiffre est sans appel : seuls 3% des professeurs et 6 % des répondants se déclarent en accord avec les politiques éducatives actuelles, contre 30 % il y a dix ans. C’est un désaveu que le syndicat qualifie de « sans appel ».

« Ce n’est pas une question de casting, mais de cap et de vision » a insisté Morgane Verviers, secrétaire générale de l’UNSA Éducation ce mardi 16 septembre 2025. « C’est le rejet d’un cap, d’une méthode et d’une vision politique ». Ce baromètre met en lumière ce que nombre de syndicats dénoncent depuis des années : l’accumulation de réformes descendantes, sans concertation ni évaluation, provoque un rejet massif des personnels.

« Depuis 2017, une même logique s’impose, demander toujours plus avec toujours moins » analyse la secrétaire générale de l’Unsa-éducation. Or, rappelle-t-elle, les milliards d’euros injectés dans des dispositifs comme le Service national universel (SNU) ou le Pacte enseignant, au détriment de la revalorisation salariale et des conditions de travail, n’ont apporté ni amélioration des résultats des élèves, ni mieux-être professionnel.

Une profession qui craque : plus d’1 répondant sur 3 souhaite changer de métier dans le public

Le chiffre le plus préoccupant du baromètre est sans doute celui-ci : plus d’un personnel sur trois envisage de quitter le métier, un sur quatre dans le privé. Un signal d’alarme massif, qui concerne également les cadres : entre 45 et 50 % des personnels de direction et d’inspection sont dans cette situation.

Le refus systématique de ruptures conventionnelles ou de démissions par l’administration, même lorsqu’elles sont motivées et planifiées, ajoute de la violence à une crise déjà bien installée.

Entre 2015 et 2025, la part des personnels pour qui les missions confiées n’ont pas de sens a doublé (passant de 15,9 à 29,4%) : aujourd’hui, pour près d’un répondant sur trois, leurs mission n’ont pas de sens. L’enquête révèle aussi que beaucoup expriment de la déception pour un métier souvent rêvé (1 tiers des répondants).

« Avoir raison tout seul a une limite »

Pour l’UNSA Éducation, l’échec est celui d’une politique et d’une vision, non d’un ministre en particulier. La fédération appelle à un tournant clair et durable, et à une reconstruction collective du projet éducatif. Le malaise profond est palpable dans tous les corps, à tous les niveaux. Les personnels, malgré le découragement, restent engagés, attachés à leurs missions, mais sont de moins en moins heureux de les exercer à cause des conditions de travail, du manque de moyen et de reconnaissance.

« Comment peut-on à ce point détourner la vocation des femmes et des hommes qui ont choisi ces métiers par engagement ? », interroge Morgane Verviers. L’UNSA Éducation le répète : les personnels n’aspirent pas à une école nostalgique ou sélective. Ils veulent les moyens de faire réussir tous les élèves, dans une école inclusive, ambitieuse et émancipatrice et non une école du tri et adéquationniste.

Trois urgences : salaires, formation, conditions de travail

Le baromètre 2025 identifie trois revendications majeures :

Le pouvoir d’achat, d’abord, reste la priorité numéro un pour 87 % des personnels. Le gel du point d’indice, l’inflation rendent les métiers de l’éducation de moins en moins attractifs.

Enfin, la charge de travail et le stress explosent. 44 % des personnels administratifs affirment travailler avec des outils inadaptés ou inefficaces, aggravant la pénibilité et le sentiment de malfaire.

La formation, ensuite, est un besoin exprimé par 32 % des répondants depuis plus de 10 ans. Pourtant, plus d’un personnel sur deux déclare n’avoir reçu aucune formation adaptée depuis trois ans. Dans certaines académies, les budgets ont été rabotés, et les formations, quand elles existent, ne correspondent pas aux besoins du terrain.

Un métier de moins en moins choisi… et conseillé

Le sentiment de perte de sens atteint un niveau préoccupant : 29 % des personnels estiment que les missions confiées n’ont plus de sens, une hausse de 10 points depuis 2018. Seuls 22 % conseilleraient aujourd’hui leur métier à un jeune, contre près d’un sur deux il y a quelques années.

Le baromètre, une boussole 

« Le baromètre n’est pas un simple constat : c’est une boussole », affirme l’UNSA Éducation. Il montre à la fois l’attachement des personnels à leurs missions et leur rejet massif de l’orientation actuelle du système.

À deux jours de la mobilisation intersyndicale du 18 septembre, la fédération rappelle qu’un changement de cap profond est attendu et montre la déconnexion entre les personnels et leur ministère, entre le quotidien professionnel et les décisions politiques, entre le sens des métiers et celui des politiques menées. « Les personnels tiennent encore, debout, par conscience professionnelle. Mais jusqu’à quand ? » s’interroge Morgane Verviers.

Djéhanne Gani

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